Matthieu Bonhomme rend hommage à Morris et réinvente la légende du poor lonesome cowboy avec « L’homme qui tua Lucky Luke » (Lucky Production).

L’histoire se situe juste avant « Fingers » (1983). Car « L’homme qui tua Lucky Luke » de Mathieu Bonhomme nous propose un cowboy solitaire encore fumeur. Il passe d’ailleurs une grande partie de l’album en quête de tabac, avant de prendre finalement la sage résolution d’arrêter la clope.

Si ce détail s’inscrit dans la légende de l’homme qui tire plus vite que son ombre, le reste de l’album ne manque pas d’intérêt non plus. N’ayons pas peur des mots, nous venons de lire le meilleur Lucky Luke depuis… depuis… depuis tellement longtemps !

« L’homme qui tua Lucky Luke » est un album one-shot (1) que Matthieu Bonhomme a sorti à l’occasion du soixante-dixième anniversaire du personnage créé par Morris. On y retrouve le cadre qui a fait la gloire de la série : une petite ville perdue dans l’ouest sous le joug d’un shérif véreux, une diligence attaquée pour voler l’or qu’elle transportait, des indiens accusés à tort et un cow-boy solitaire venu rendre la justice.

Sauf que Matthieu Bonhomme a transposé l’univers de Morris dans une atmosphère plus sombre. Le héros, au visage moins anguleux, démontre quelques faiblesses et devient plus humain, tandis que Jolly Jumper est définitivement ramené à son rôle de monture dénuée de parole et d’esprit. Lucky Luke est confronté à la lâcheté des hommes, leur cupidité, mais aussi à la bonté insoupçonnée des plus méchants. En outre, la maladie et la mort sont omniprésentes tout au long de l’album.

Cette aventure parallèle de Lucky Luke est une telle réussite que l’on se pose la question sur le traitement que l’on devrait porter aux héros mythiques de la BD lorsque leur créateur n’est plus en mesure de poursuivre son œuvre. Plutôt que de prolonger les séries avec des auteurs tiraillés entre le respect de l’esprit originel et l’envie d’y apporter une touche personnelle (suivez notre regard), ne devrait-on pas se contenter de confier nos héros aux auteurs de la nouvelle génération le temps d’un album, un seul, avec une totale liberté de traitement ?

La maison Dupuis a tenté l’expérience d’une série parallèle des Spirou et Fantasio avec la réussite que l’on connait. Le Valérian et Laureline de Larcenet est une petite pépite. Et ce Lucky Luke de Matthieu Bonhomme déjà consacré comme l’un des meilleurs albums de l’année 2016. En attendant celui de Guillaume Bouzard, très prometteur également.

BD "L'homme qui tua Lucky Luke" (Mathieu Bonhomme)

(1) Edit 2021 : Un deuxième tome de Lucky Luke par Mathieu Bonhomme sortira cinq ans plus tard sous le titre « Wanted Lucky Luke« 

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